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Salah Chekirou
Photo El-Watan |
Après avoir eu un véritable succès, notamment à travers ses deux romans, Le grain de sable, traitant de l’assassinat du président Mohamed Boudiaf, en 1992, et Tycoon et l’empire des sables, relatant l’affaire Khalifa, le journaliste-écrivain Salah Chekirou revient cette fois avec un nouveau roman d’histoire.
Invité
samedi dernier (novembre 2018) pour une rencontre-signature à la librairie Média-Plus et pour
la première fois à Constantine, Salah Chekirou nous parle de son nouvel
ouvrage, Adjras El Fana (Les glas de la finitude), écrit en arabe et publié aux
éditions El Qobia.
A
travers cette saga en deux parties, qui s’étale de 1940 à 2022, l’ancien
rédacteur en chef de la revue L’unité, en version arabe, tente de mettre à nu
l’ostracisme dont a été victime la Wilaya II dans le récit historique officiel
et même dans les travaux des historiens. «Lorsque j’étais au stade de la
documentation et du recueil d’informations, je me suis rendu compte que la
Wilaya II historique a toujours été négligée, que ce soit dans les études, dans
les médias ou dans les romans.
Elle
a toujours été mise à l’écart, et cela bien sûr c’était la conséquence de ce
que pratiquaient les différents pouvoirs vis-à-vis de cette Wilaya», a-t-il
expliqué dans un échange avec El Watan.
Cet
après-midi littéraire chez Medias-Plus se déroulait dans une ambiance
conviviale, comme de coutume, l’invité était entouré de ses proches, amis et
fidèles lecteurs et n’hésitait pas à engager et nourrir de sympathiques et riches conversations avec le public. En mettant en exergue le rôle de la Wilaya
II pour arracher l’indépendance, Chekirou n’a pas peur d’éclairer des facettes
refoulées au détriment de la vérité quand, durant l’été 1962, cette région, et
notamment Constantine, a été «priée» par la force de se mettre à l’ombre.
L’exil en 2006
En
faisant des recherches approfondies, l’auteur affirme en outre avoir découvert
un être exceptionnel, «bourré d’humanisme» et «d’humilité» en la personne de
Zighout Youcef, commandant de la Wilaya II. Chekirou affirme avoir eu un coup
de cœur pour ce guide révolutionnaire, ce qui a motivé, explique-t-il, son
projet littéraire, épuré du discours historique, politique ou idéologique.
Interrogé
par El Watan sur la censure de ses deux premiers romans, Tycoon et L’empire des
sables et Le grain de sable, Salah Chekirou confie qu’aborder ce sujet est une
manière de remuer le couteau dans la plaie. «Il y a un seul problème qui me
chagrine encore un peu. Au moment où Tycoon et l’empire des sables a été
ramassé des librairies et de chez des distributeurs et brûlé, aucun journal,
aucun journaliste n’a soufflé mot.
Mis à
part un journaliste d’El Watan, Adlene Meddi, que je cite d’ailleurs dans mon
roman Arnaques à l’algérienne. C’était à l’occasion du 12e Sila, et c’était le
seul qui avait signalé l’interdiction de L’empire des sables, traduit en arabe
et ramené par un éditeur libanais. On a interdit le roman pendant que j’étais
commissaire exécutif du Salon du livre !» a-t-il rappelé avec beaucoup de
regret. Et d’avouer que c’était l’une des raisons l’ayant poussé à quitter le
pays, c’était en 2006.
Un
nouveau projet en chantier
Levant
le voile sur ses projets, Salah affirme vouloir s’éloigner un peu du roman
historique, qu'il considère comme «très fatigant». Il confie aux lecteurs d’El
Watan qu'il est sur un nouveau projet et qu'il a largement avancé dans
l’écriture de ce roman qui relate une rencontre entre un islamiste d’origine
algérienne et un gay montréalais. «Je vous laisse imaginer le choc entre ces
deux cultures, ces deux extrêmes. Ce
roman est totalement différent de ce que j’avais l’habitude d’écrire. C’est un
livre destiné aux Canadiens et à leurs références», a-t-il dit, en écartant
d’ores et déjà sa publication en Algérie et en exprimant «sa rage» de constater
«la décadence» qui frappe le pays où «on laisse de côté tout ce qui est
scientifique au profit des zaouïas et du charlatanisme».
Yousra Salem, El-Watan, 13 novembre 2018