samedi 6 juin 2020

Liberté : Mouloud Belabdi, auteur et ancien animateur de radio, raconte son confinement


"J’ai déterré un vieux projet sur Dassine, la poétesse des Touareg"


Installé au Canada depuis 1997, Mouloud Belabdi profite de cette période pour l’écriture, notamment, d’un scénario sur la poétesse qu’il devait réaliser avec Rabia Benmokhtar (1).

La génération des années 1980-90 se souvient-elle de cet animateur de la Chaîne 3 de la Radio algérienne ? Ses émissions ne passaient pas inaperçues, comme celle qui avait obtenu en 1994, à Paris, une distinction de l’Université radiophonique et télévisuelle internationale. 
C’est de là qu’est venue la publication, en 2006, de Chant de la douleur et de l’espérance algérienne, recueil de poésie édité par la fondation littéraire Fleur de Lys (Québec). Enseignant, écrivain, Mouloud Belabdi vit au Canada depuis 1997. Comme tout le monde, il a été marqué par la crise sanitaire mondiale qui a “un impact psychologique certain sur notre vie et nos comportements. Il y a un sentiment de vivre un film de science-fiction, seulement ce n’est pas de l’imagination, c’est le réel qui a basculé”, nous a-t-il confié. Au Québec, comme partout, tout le monde est mobilisé pour lutter contre l’épidémie de Covid-19 qui a sévèrement touché les “les centres de soins et les résidences privées pour personnes âgées, au point où le gouvernement a fait appel à l’armée pour prêter main-forte là où la situation était difficile.

Maintenant, la situation est globalement sous contrôle, accompagnée d’un déconfinement progressif”. Pour Mouloud Belabdi, la première leçon à tirer de cette crise est “de revoir le rôle de l’État dans les soins à apporter à la population. On le voit clairement à présent, ce sont les hôpitaux publics qui sont à l’avant-poste. Les travailleurs de la santé devraient à cet égard être revalorisés”. Même si les repères avaient presque disparu au début de la crise, le temps est progressivement mis à profit pour travailler : “En plus du télétravail avec l’école où j’enseigne, j’ai déterré un vieux projet de scénario que je devais réaliser avec mon ami le regretté cinéaste Rabia Benmokhtar sur Dassine, la poétesse légendaire des Touareg de l’Ahaggar (début du XXe siècle). Je souhaite en faire un récit à terminer d’ici à la fin de l’année.”  

Pour expliquer son “silence littéraire”, Belabdi affirme : “Je ne suis pas un auteur prolifique. Le travail professionnel est mon gagne-pain”, avant de rappeler qu’il a tout de même publié “des nouvelles dans les journaux et participé à des travaux collectifs comme par exemple la Littérature canadienne québécoise – La ville en écriture”, paru aux éditions du Tell en 2010 : “Mon premier recueil de poèmes, Mandala, a été publié en Algérie aux Éditions Fennec en 1994. Le deuxième, Intensément la vie - Cycles, a été publié en 2005 aux éditions de la Fondation littéraire Fleur de Lys (Québec), qui a publié également en 2006 Chant de la douleur et de l’espérance algériennes.” Quand on lui rappelle sa première passion, la radio, Mouloud Belabdi évoque une expérience qui a tourné court : “Quand je suis arrivé à Montréal en 1997, je pensais travailler à la radio. L’année suivante, j’ai commencé à Radio-Canada Internationale, mais pour des remplacements. Il fallait patienter. Au bout d’une année d’attente, j’ai abandonné l’idée de la radio pour un autre travail.” 

On sent de la nostalgie dans le propos. Après l’obtention d’un baccalauréat en éducation (équivalent d’une licence), il s’engage dans l’enseignement et s’installe dans une vie paisible au Canada : “Je suis issu de l’Université algérienne du début des années 70 qui était ouverte sur la société et le monde. Mon travail à la radio à cette époque m’a ouvert d’autres horizons. Je côtoyais des gens venant des quatre coins du monde.” Le pays, les racines, sont omniprésents. “Je reste attaché à ma patrie, c’est-à-dire le pays où je suis né et avec lequel je garde des attaches sentimentales très fortes. Il y a la famille, les amis. Cependant, je demeure fondamentalement un citoyen de la Terre-Patrie.”

ALI BEDRICI


mardi 4 juin 2019

Nassira Belloula remporte la première Bourse Charles-Gagnon

Nassira Belloula

L’écrivaine Nassira Belloula est la première lauréate de la bourse Charles-Gagnon. Cette bourse, dotée d’un montant de 3 000 $ offert par la Fondation Lire pour réussir, est remise une fois l’an à un écrivain ou une écrivaine du Québec pour un projet d’écriture en cours d’achèvement. Deux genres littéraires sont admissibles à ce concours annuel : l’essai ainsi que l’ouvrage à caractère historique (monographie, biographie, etc.).

En janvier 2019, la Fondation Lire pour réussir a reçu un don de 30 000 $ de la part de la Fondation Charles-Gagnon. Ce don avait pour objectif de mettre sur pied un concours littéraire annuel qui sera couronné par la remise de la bourse Charles-Gagnon. La Fondation Lire pour réussir a mandaté l’Union des écrivaines et des écrivains québécois (UNEQ) pour organiser, en son nom, ce concours.

Le jury de la bourse Charles-Gagnon était formé de l’écrivain Michel Côté (président du jury), de l’auteur spécialisé en histoire Raymond Ouimet et du biographe Gaston Therrien. Après avoir évalué 26 dossiers de candidature, le jury a choisi, à l’unanimité, le projet d’essai sur le féminisme et l’islam de Nassira Belloula.

jeudi 24 janvier 2019

Salah Chekirou signe Les glas de la finitude à Constantine - L’histoire autrement vue, malgré la censure

Salah Chekirou
Photo El-Watan 

Après avoir eu un véritable succès, notamment à travers ses deux romans, Le grain de sable, traitant de l’assassinat du président Mohamed Boudiaf, en 1992, et Tycoon et l’empire des sables, relatant l’affaire Khalifa, le journaliste-écrivain Salah Chekirou revient cette fois avec un nouveau roman d’histoire.


Invité samedi dernier (novembre 2018) pour une rencontre-signature à la librairie Média-Plus et pour la première fois à Constantine, Salah Chekirou nous parle de son nouvel ouvrage, Adjras El Fana (Les glas de la finitude), écrit en arabe et publié aux éditions El Qobia.

A travers cette saga en deux parties, qui s’étale de 1940 à 2022, l’ancien rédacteur en chef de la revue L’unité, en version arabe, tente de mettre à nu l’ostracisme dont a été victime la Wilaya II dans le récit historique officiel et même dans les travaux des historiens. «Lorsque j’étais au stade de la documentation et du recueil d’informations, je me suis rendu compte que la Wilaya II historique a toujours été négligée, que ce soit dans les études, dans les médias ou dans les romans.

Elle a toujours été mise à l’écart, et cela bien sûr c’était la conséquence de ce que pratiquaient les différents pouvoirs vis-à-vis de cette Wilaya», a-t-il expliqué dans un échange avec El Watan.

Cet après-midi littéraire chez Medias-Plus se déroulait dans une ambiance conviviale, comme de coutume, l’invité était entouré de ses proches, amis et fidèles lecteurs et n’hésitait pas à engager et nourrir de sympathiques et riches conversations avec le public. En mettant en exergue le rôle de la Wilaya II pour arracher l’indépendance, Chekirou n’a pas peur d’éclairer des facettes refoulées au détriment de la vérité quand, durant l’été 1962, cette région, et notamment Constantine, a été «priée» par la force de se mettre à l’ombre.

L’exil en 2006

En faisant des recherches approfondies, l’auteur affirme en outre avoir découvert un être exceptionnel, «bourré d’humanisme» et «d’humilité» en la personne de Zighout Youcef, commandant de la Wilaya II. Chekirou affirme avoir eu un coup de cœur pour ce guide révolutionnaire, ce qui a motivé, explique-t-il, son projet littéraire, épuré du discours historique, politique ou idéologique.

Interrogé par El Watan sur la censure de ses deux premiers romans, Tycoon et L’empire des sables et Le grain de sable, Salah Chekirou confie qu’aborder ce sujet est une manière de remuer le couteau dans la plaie. «Il y a un seul problème qui me chagrine encore un peu. Au moment où Tycoon et l’empire des sables a été ramassé des librairies et de chez des distributeurs et brûlé, aucun journal, aucun journaliste n’a soufflé mot.

Mis à part un journaliste d’El Watan, Adlene Meddi, que je cite d’ailleurs dans mon roman Arnaques à l’algérienne. C’était à l’occasion du 12e Sila, et c’était le seul qui avait signalé l’interdiction de L’empire des sables, traduit en arabe et ramené par un éditeur libanais. On a interdit le roman pendant que j’étais commissaire exécutif du Salon du livre !» a-t-il rappelé avec beaucoup de regret. Et d’avouer que c’était l’une des raisons l’ayant poussé à quitter le pays, c’était en 2006.

Un nouveau projet en chantier

Levant le voile sur ses projets, Salah affirme vouloir s’éloigner un peu du roman historique, qu'il considère comme «très fatigant». Il confie aux lecteurs d’El Watan qu'il est sur un nouveau projet et qu'il a largement avancé dans l’écriture de ce roman qui relate une rencontre entre un islamiste d’origine algérienne et un gay montréalais. «Je vous laisse imaginer le choc entre ces deux cultures, ces deux extrêmes. Ce roman est totalement différent de ce que j’avais l’habitude d’écrire. C’est un livre destiné aux Canadiens et à leurs références», a-t-il dit, en écartant d’ores et déjà sa publication en Algérie et en exprimant «sa rage» de constater «la décadence» qui frappe le pays où «on laisse de côté tout ce qui est scientifique au profit des zaouïas et du charlatanisme».

Yousra Salem,  El-Watan, 13 novembre 2018

jeudi 2 août 2018

Katia Belkhodja : La marchande de sable

Page de couverture
Montréalaise d’origine algérienne, Katia Belkhodja, finaliste du prix Arlette-Cousture 2016, a signé aux Éditions XYZ, un second roman La marchande de sable, un récit où se confrontent langues et histoires, peuples nomades et sédentaires, désert et ville. 

Il est question d’une petite fille, nommée Schéhérazade, et de ses pouvoirs étranges. Elle a un rapport complexe à la langue arabe, qui est pour elle à la fois langue étrangère et langue paternelle. Utilisant cette langue, elle fait appel à son père. Mais quand le père arrive, il est trop tard. La ville doit-elle imposer une seule langue, sédentaire, enracinée ? La ville qui a opté pour la fixité (par contraste à la mobilité nomade) se trouve infectée par l’arabe, infection qui sera la cause de sa destruction. 

Pour aller plus loin : 

Yvon Paré, Katia Belkhodja risque de vous envoûter, 23 avril 2015. 
Suzanne Giguère, Roman québécois - La mélancolie du désir, Le Devoir du 22 mars 2008.
Éric Paquin, Katia Belkhodja, le goût des autres, Voir du 10 juillet 2008.

vendredi 1 juin 2018

Karim Akouche reçoit le grand prix « Lys Arts et Culture »

Karim Akouche
Karim Akouche, poète, écrivain et éditeur a reçu le grand prix « Lys Arts et Culture » décerné par l’agence de presse Médiamosaïque. Ce prix lui a été remis lundi 28 mai à Montréal, au Théâtre St-James. 

Le jury a été notamment séduit par son roman La Religion de ma mère et ses apports aux arts et à la culture du Québec.

Il dédie cette récompense au blogueur kabyle Merzouk Touati, condamné à 10 ans de prison en Algérie.

Karim Akouche aime à rappeler que l'écrivain est un agitateur des mots et gardien de la libre pensée. « Rien ni personne ne peut le faire taire. Il a le droit de secouer les endormis, de heurter les belles âmes, de choquer les bonnes consciences » souligne-t-il.

Et d’ajouter : « Écrire, c'est interroger son cœur qui bat. Écrire, c'est se murmurer des mélodies fragiles. Écrire, c'est dessiner les fantômes qui hantent l'enfant que l'on n'a jamais cessé d'être. Écrire, c'est planter un scalpel dans sa chair pour en sentir la douleur. Écrire, c'est coudre ses blessures avec la pointe de son stylo. Écrire, c'est saisir les failles de l'histoire qui triche. Écrire, c'est noyer le mensonge dans le fleuve absurde de la vie. Écrire, c'est insuffler de la chaleur dans le cœur glacé des hommes.
Écrire, c'est répandre la lumière sur les yeux aveugles du monde. »

lundi 19 mars 2018

"Nos silences" de Wahiba Khiari aux Éditions XYZ

Page de couverture

J’ai déjà évoqué ce roman de Wahiba Khiari  qui raconte l’Algérie des années quatre-vingt-dix. Voici la présentation qu’en fait l’éditeur québécois XYZ qui vient de le rééditer : 

"Elles ont été des milliers à être enlevées, violées, parfois assassinées, celles que l’on nomme les « filles de la décennie noire ». Ces jeunes femmes, souvent des fillettes, à qui le gouvernement algérien a demandé le silence à travers sa politique de « réconciliation nationale », ont ravalé leur honte. Tandis que résonne le cri de l’une d’elles, subissant l’horreur, la narratrice raconte sa culpabilité d’avoir choisi l’exil et trouvé le bonheur. Deux voix de femmes en écho qui prennent la parole haut et fort, en mémoire de toutes les autres..."


Pour aller plus loin :

mercredi 14 mars 2018

Du sucré à l'amer : nouveau recueil de poésie de Djaffar Kaci

Nouveau recueil de Djaffar Kaci 


« Si les mots m’ont, de tout temps, apaisé, ceux qui sont dans ce livre m’ont littéralement affranchi. Ce livre est à présent entre vos mains. Comme un miroir, nul doute que vous y verrez le reflet de mon apaisement et celui de mon bonheur. »
Djaffar Kaci


Après Pour l’amour des mots, Le printemps fleurira bientôt et Les braises de mes vingt ans, Djaffar Kaci, journaliste, auteur et poète, nous offre Du sucré à l’amer *, un recueil de poésie où il met sa passion  des mots pour « exorciser le spleen qui a pris ses quartiers, un moment de sa vie ». 

Les Goncourt ont l’habitude de dire qu’on n'écrit pas les livres que l’on veut. Djaffar Kaci, lui, voulait vraiment ce livre, car il vient, telle une urgence, panser une blessure.

Djaffar Kaci présidera le lancement de son recueil le samedi 31 mars à 13h30 au Centre de formation Trait d’Union, au 230, boulevard Henri Bourassa Est à Montréal.

* Djaffar Kaci, Du sucré à l'amer, Les éditions de la Francophonie, Caraquet NB, 2018, 15 $.